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Tableaux des maladies professionnelles

Régime général tableau 63

Affections provoquées par les enzymes

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Tableau et commentaires
Tableau et commentaires

Description clinique de la maladie indemnisable (janvier 2006)

I. Eczéma

Définition de la maladie

Les manifestations eczématiformes liées au contact avec les enzymes protéolytiques ont été décrites dès les années soixante, en particulier lors de leur utilisation «intensive» dans les détergents.

De même, la dermatite de contact aux protéines a été individualisée, dès les années soixante-dix, en particulier chez les travailleurs préparant viandes et poissons en particulier.

Le terme lésion eczématiforme, s’il est classiquement utilisé en cas d’eczéma allergique, peut médicalement couvrir l’ensemble des eczémas et réactions eczématiformes liés à l’irritation et à l’allergie.

Un eczéma se définit comme une inflammation superficielle de la peau accompagnée de prurit et caractérisée par une éruption polymorphe formée d’érythème, de vésicules, de croûtes et de desquamation.

Diagnostic

Le diagnostic est avant tout clinique et doit tenir compte de plusieurs critères : la clinique, l’anamnèse et l’obtention de tests épicutanés (ou autres) positifs.

La clinique retrouve les différentes lésions citées dans la définition qui se succèdent généralement en 4 phases (phase d’érythème prurigineux, plus ou moins oedémateux ; phase de vésiculation ; phase de suintement ; phase de régression).

L’eczéma se traduit toujours, sur le plan anatomo-pathologique, par une «spongiose» (distension oedémateuse des espaces intercellulaires des kératinocytes) associée à l’«exocytose» (migration dans l’épiderme de cellules inflammatoires d’origine sanguine).

Sur le plan clinique, l’eczéma de contact allergique peut se présenter sous différents aspects :

- l’eczéma aigu érythémato-papulo-vésiculeux accompagné de prurit.

- l’eczéma «sec» érythémato-squameux.

- l’eczéma lichenifié est en général un eczéma ancien, très prurigineux.

Selon la topographie, l’eczéma de contact prend des aspects différents :

- la peau de la face réagit précocement.

- l’eczéma des mains et des doigts est le plus fréquent (dos des mains et des doigts).

L’anamnèse doit être minutieuse (chronologie des faits, sièges des premières lésions, évolutivité). Elle doit rechercher des facteurs professionnels (gestes, produits, effet éventuel de l’arrêt de travail…), vestimentaires, cosmétiques, médicamenteux…, mais aussi le rôle possible des substances liées à l’activité non-professionnelle ou aux activités de loisirs (jardinage, bricolage, entretien…).

L’anamnèse, aussi précise que possible, ne peut fournir que des indices de présomption. Elle doit être confirmée ou infirmée par la réalisation de tests épicutanés.

Les tests épicutanés visent à reproduire «un eczéma en miniature» en appliquant la substance suspecte sur une zone limitée de la peau (habituellement le dos). Ils doivent être réalisés par des personnes ayant l’habitude d’interpréter les résultats afin de valider les critères de pertinence du test et d’imputabilité de la substance.

Le diagnostic différentiel se fait surtout avec la dermite d’irritation (voir tableau comparatif). Il convient de signaler qu’un eczéma de contact allergique peut se greffer sur une autre dermatose préexistante.

Le diagnostic étiologique. Les manifestations cutanées liées aux enzymes sont souvent brutales (aggravation des symptômes dans les 30 minutes qui suivent la mise au travail) avec prurit intense, érythème, urticaire, réactions vésiculeuses.

D’ailleurs, les manifestations cliniques eczémateuses traduisent autant le processus irritatif qu’immunologique.

Evolution

Si l’agent causal est supprimé, l’eczéma disparaît, surtout si une thérapeutique appropriée est mise en place.

Si le contact est maintenu, les récidives seront régulières avec possibilité d’extension de l’atteinte cutanée (atteinte de l’ensemble du corps) pouvant entraîner des tableaux plus graves.

Traitement

Le traitement comporte en priorité l’éviction des agents responsables. Toute autre thérapeutique est vouée à l’échec si une telle éviction ne peut se réaliser.

Le traitement local doit répondre aux règles générales du traitement des eczémas : compresses humides froides et pâte à l’eau à la phase aiguë, suintante ; préparations contenant un corticostéroïde aux phases subaiguë et chronique.

II. Ulcérations cutanées

Définition de la maladie

Une ulcération correspond à tout processus pathologique aboutissant à la formation d’un ulcère se traduisant par une perte de substance au niveau de la peau, sans tendance à la cicatrisation spontanée.

L’irritation cutanée regroupe par définition toutes les lésions non immunologiques subies par la peau au contact de différents agents physicochimiques. Les lésions sont extrêmement variées.

En dermatologie, on parle d’irritation, mais aussi de causticité et/ou corrosion. Ces derniers mots désignent une irritation majeure entraînant souvent des séquelles cicatricielles visibles (brûlures chimiques).

En cas d’irritation, les lésions épidermiques observées au microscope sont variées (nécrose cellulaire, vésicules, eczéma, œdème). Il existe aussi des altérations physiologiques de la peau, en particulier une sécheresse cutanée.

Diagnostic

Certaines enzymes peuvent jouer un rôle irritant, notamment dans la dermatite de contact aux protéines. De même, les enzymes présentes dans certains détergents peuvent avoir des propriétés irritantes.

Les dermites d’irritation se traduisent par un aspect inflammatoire de la peau avec rougeur (érythème), picotement, sensation de cuisson et développement de placards érythémato-squameux sur la surface cutanée au contact avec la substance irritante dans les heures qui ont précédé le début de l’éruption.

Les lésions sont généralement limitées aux zones de contact sans «atteinte à distance».

Si l’effet caustique est toujours collectif, l’effet irritant l’est plus ou moins (cf. facteurs de risques).

Les tests épi-cutanés sont négatifs et souvent inutiles.

Aux mains, les dermites d’irritation ont un aspect stéréotypé: atteinte du dos des mains et des doigts, les limites de l’érythème sont nettes. L’érythème, en fonction de la chronicité, devient squameux, hyperkératosique.

Le diagnostic entre dermite d’irritation et eczéma n’est pas toujours simple (voir tableau comparatif) et nécessite une collaboration médecins du travail, dermatologues, en particulier dans les centres de dermatologie professionnelle.

Il est bien établi que les enzymes comme de nombreuses protéines ont un pouvoir irritant, par dégradation des kératines épidermiques. A titre d’exemple, on peut citer la trypsine et la chymotrypsine de l’intestin des poissons, comme les enzymes protéolytiques provenant des plantes (oignons, jacinthes…).

Par ailleurs, les enzymes utilisées dans certains détergents ont elles aussi révélé leur «haut» potentiel irritant.

Evolution

De manière habituelle, une dermite d’irritation aiguë apparaît dans les heures qui suivent le contact ; elle disparaît rapidement après la cessation du contact.

Séparées de manière artificielle des dermites d’irritation aiguës, les dermites d’irritation chronique sont consécutives de l’application répétée plusieurs fois par jour d’irritants ubiquitaires. Si les signes subjectifs sont le plus souvent sensation de picotement ou de brûlure, les signes objectifs associent l’érythème à des signes d’atteinte épidermique (sécheresse, hyperkératose, crevasses…).

Traitement

Outre l’éviction ou la réduction des contacts responsables, le traitement de l’irritation est essentiellement local : crème, pommade ou onguents seront utilisés en fonction de la sécheresse de la peau. L’utilisation d’un corticostéroïde faible est habituellement conseillée, en particulier dans la phase aiguë.

Facteurs de risque

Les dermites d’irritation sont habituellement multifactorielles. A côté des facteurs exogènes (microtraumatismes, irritants chroniques, environnement de travail…), il existe des facteurs endogènes qui peuvent expliquer la susceptibilité individuelle, ainsi le «terrain» atopique intervient indiscutablement pour certains salariés.

Enfin, si l’effet irritant est le plus souvent «collectif», il peut être individuel en fonction des facteurs qui modulent l’intensité de la réaction d’irritation (nature de la molécule, concentration, fréquence des contacts, environnement occlusif, température ambiante, état d’irritabilité de la peau).

III. Conjonctivite aiguë

Définition de la maladie

La conjonctive est une muqueuse oculaire en contact avec l’atmosphère qui protège l’œil contre les agressions extérieures. Elle tapisse la face antérieure du bulbe oculaire et la face interne des paupière et forme deux culs de sac supérieur et inférieur. La conjonctive réagit aux agressions selon un même processus quelle que soit leur origine ; la conjonctivite est l’affection la plus fréquente de la conjonctive. Les étiologies sont diverses, infectieuses bactériennes et virales, parasitaires, allergiques ou irritatives. La voie d’entrée est le plus souvent exogènes, plus rarement endogènes (infection généralisée ou réaction locale allergique à l’introduction d’un antigène dans l’organisme).

Diagnostic

Les signes fonctionnels sont une sensation de gêne, de cuisson, de corps étranger, de sable dans les yeux, une douleur superficielle, une photophobie ou un prurit (évoquant plus particulièrement l’allergie). L’acuité visuelle est normale. Le principal signe physique est l’hyperhémie, avec une rougeur de l’œil (à un stade plus avancé peuvent apparaître des suffusions hémorragiques). Un œdème se manifeste par un gonflement de la conjonctive bulbaire (le chémosis) et plus rarement des paupières. Les sécrétions conjonctivales engluant les cils le matin et gênant l’ouverture des paupières sont un des meilleurs signes de la conjonctivite. Existe aussi un larmoiement réflexe.

L’examen de l’œil doit être complet (cornée, paupières dont le bord libre, appareil lacrymal, recherche d’adénopathies loco-régionales) et complété par l’examen général du malade, facilitant la recherche étiologique et le diagnostic différentiel.

Evolution

La conjonctivite peut être aiguë, subaiguë, chronique ou récidivante, en fonction de l’étiologie et  de la persistance de la cause.

Les complications possibles sont l’extension à d’autres zones de l’œil avec le risque de kératite, de blépharites, de cicatrices ou de sténoses des canaux lacrymaux, principalement dans le cas des conjonctivites infectieuses.

Traitement

L’éviction du risque est nécessaire. La nature du traitement médicamenteux varie selon l’étiologie ; il est principalement local à base de pommades et surtout de collyres.

IV. Rhinite

Définition de la maladie

La rhinite professionnelle traduit une sensibilisation acquise des voies respiratoires supérieures vis à vis d’un allergène inhalé présent dans l’environnement professionnel. Les mécanismes physiopathologiques, encore mal connus, s’apparentent à ceux décrits pour l'asthme sans toutefois que les deux pathologies soient superposables. La rhinite pouvant précéder l'apparition d'un asthme professionnel, son diagnostic est un élément important de prévention secondaire.

Diagnostic

Le diagnostic de rhinite doit être évoqué devant un tableau associant de façon variable éternuements, rhinorrhée et obstruction nasale. On peut également observer un prurit nasal et plus rarement épistaxis, croûtes, surinfection et troubles olfactifs. Une conjonctivite, une toux spasmodique ou un asthme peuvent se voir de façon contemporaine ou à distance. L’origine professionnelle est suspectée devant la rythmicité des symptômes avec apparition au travail et amélioration pendant les périodes de repos. La présence de plusieurs cas dans une même entreprise a également une bonne valeur d’orientation. L’interrogatoire doit de toute façon être précis pour faire décrire les conditions de travail et les produits manipulés.

La rhinite liée aux enzymes est une rhinite allergique due à leur nature protéique : elle est plus fréquente chez les atopiques et elle précède souvent l’asthme ; elle s’accompagne d’une élévation des IgE spécifiques. Les préparations pour prick tests ne sont disponibles en routine que pour l’alpha amylase.

Un test de provocation nasale peut apporter la confirmation du diagnostic étiologique.

Evolution

Une prise en charge précoce permet habituellement une guérison sans séquelles. Si l'exposition est poursuivie, la rhinite peut se pérenniser et évoluer vers un asthme au pronostic plus sombre.

Traitement

Le traitement symptomatique de la rhinite associe antihistaminiques, corticoïdes locaux, décongestionnants… Sur le lieu de travail, l'exposition doit être réduite au niveau le plus bas possible. Une éviction totale vis à vis de la substance responsable est parfois nécessaire.

V. Asthme

Définition de la maladie

C'est un asthme au sens strict, mais induit par l'inhalation d'allergènes présents sur les lieux de travail.

Diagnostic

L'expression clinique de l'asthme professionnel n'a rien de spécifique. Elle se manifeste par des crises dyspnéiques avec sibilances. Les troubles respiratoires peuvent débuter dès les premiers mois d'exposition, mais la période de latence peut durer plusieurs années.

L’asthme aux enzymes est de nature immunoallergique et survient préférentiellement sur un terrain atopique. Il succède souvent à une rhinite. Son délai de survenue varie de quelques mois à quelques années en fonction de la concentration en protéines enzymatiques dans l’atmosphère de travail.

Les prick tests existent en préparation commerciale pour l’alpha amylase et peuvent être aussi réalisés à partir des enzymes manipulées à condition d’effectuer des dilutions importantes pour éviter un effet d’irritation.

Des IgE spécifiques ont été identifiées pour plusieurs enzymes : maxalase, savinase (lessives), cellulase, alpha amylase, papaïne.

Les tests de provocation bronchique lors de manipulation de préparations enzymatiques diluées de 1/1 000 à 1/100 000 sont caractérisés par une réaction immédiate souvent intense et par la fréquence de la réaction retardée plusieurs heures après l’inhalation.

Evolution

La gravité des formes évolutives dépend de la symptomatologie présentée, de l’intensité de l’hyperréactivité bronchique, de l’existence d’un syndrome obstructif de base, de l’importance du traitement nécessaire.

L’éviction est le plus souvent conseillée. Lorsque les mesures de prévention permettent de limiter l’exposition au niveau le plus faible possible, le maintien au poste sous surveillance médicale très rapprochée peut parfois être proposé.

Traitement

Le traitement de crises d'asthme professionnel est un traitement symptomatique sans spécificité.

La prévention de leurs récidives suppose une intervention sur le poste de travail avec suppression de la nuisance en cause ou réduction au niveau le plus bas possible. Une éviction totale vis-à-vis de la substance responsable est parfois nécessaire.